Un recoin d’ombre où règne le Silence
Ce matin le Soleil, scintillant dans les cieux,
S’est levé doucement sur la ville déserte.
Il a fait le chemin dansé jusqu’à mes yeux
Qui n’ont même daigné l’accueillir -pure perte !
Je l’ai vu déployer son faste et sa splendeur,
Tenter de me corrompre à l’aide de lumière,
-Quelques rayons à peine, un soupçon de chaleur-
Croyant la chose faite, il reprit ses affaires.
Car depuis qu’en ermite il vit dans son Cosmos,
Retranché, isolé derrière ses nuages,
Il regarde cet homme aux mains de chair et d’os
Et le voit l’adorer sans raison ni courage.
Alors ce jour où moi petit homme être vain,
Retiré dans mon lit, refusai ses services
Dénigrant sa beauté, rejetant son divin,
Ce jour-là s’effondra son orgueil -quel supplice !
Par excès de folie ou élan de fierté,
Il sembla détourner son regard de la Terre,
Laissant un voile d’ombre engloutir les pavés,
Il me regarda moi, cet être téméraire.
Il fit danser le feu sur mes joues et mon front,
Assomma mes douleurs, les poussant à la fuite,
Et scella dans mon cœur la douceur des rayons :
Tout Homme, alors conquis, aurait repris les rites.
Mais j’étais en prison, enserré dans mes draps.
Mon geôlier le Malheur, aux nombreuses dérives,
Observait seul la scène et riait aux éclats ;
Le Soleil poursuivant sa vaine tentative.
Mais très vite voyant ses efforts échouer ;
Ni chaleur ni rayons, ni douceur ni lumière
Ne provoquant en moi l’attitude escomptée,
Le prit au dépourvu une noire colère.
Il sembla me crier :
« Je suis haut dans l’espace et tu es bas ! Respecte
Ma grandeur car tu n’es
Qu’un seul parmi les tiens. Les tiens sont mes adeptes ! »
« Je suis l’astre divin !
Le disque de lumière ! Et suis le jour à l’aube
Et suis la nuit. Humain !
Vis cette vie avant que je ne la dérobe. »
« Mais je te vois languir
Fainéant ! La tristesse a vaincu ton courage
A brisé tes désirs !
Vois en moi ton issue, entends bien mon message,
Autrement, je le dis,
Tu risques de te perdre ! Et pareil à l’aveugle,
Au fin fond de la nuit,
Tu vas errer sans but, sans attache ni règles. »
« Et je serais présent
Lorsque tu reviendras en offrande à la terre
-Moi ton bûcher ardent !-
Je me rirais de toi. Toi qui n’es que poussière ! »
C’est là que la chaleur devint cruel brasier
Et les rayons odieux et la douceur violence
Et la lumière affreuse : le Soleil s’est vengé.
Je cherche un recoin d’ombre où règne le Silence.
Gorgonzola ©